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IPCC ( GIEC) AIE (IEA) ASPO J.M. Jancovici

Les sujets abordés ici (climatologie et géologie) ne relèvent pas spécifiquement de notre domaine d'expertise. Cette page rend compte des travaux réalisés par la communauté internationale des scientifiques concernés par ces sujets : les climatologues d'une part et les géologues d'autre part. Cela ne nous empêche pas de suivre leurs travaux et d'en apprécier la rigueur.

Ou est le problème ?

a. Les changements climatiques

Depuis 1988, la communauté internationale (ONU, UNEP et WMO) a rassemblé les scientifiques climatologues au sein de l'IPCC (GIEC en français). Ce sont eux qui, toutes tendances confondues, analysent :

Leur conclusion est : l'activité humaine augmente la concentration des gaz à effet de serre (GES) dans l'atmosphère (CO2, CH4, N2O, divers fluorures et l'eau). C'est-à-dire en gaz qui laissent passer le rayonnement du soleil vers la terre mais empêchent partiellement le rayonnement de la terre vers l'espace. Cette énergie qu'elle n'arrive pas à libérer fait alors obligatoirement monter la température de la Terre, elle se réchauffe jusqu'à atteindre une température suffisante pour pouvoir renvoyer dans l'espace toute l'énergie qu'elle a reçu du soleil, malgré le frein que constituent les GES. C'est ce que l'on appelle le "réchauffement climatique". Et même si on arrête de produire des GES, la planète se réchauffera dans les décennies qui viennent, parce que la Terre mettra du temps à atteindre la nouvelle température d'équilibre. Elle se réchauffera moins cependant que si l'on continue à produire des GES.

C'est l'utilisation des combustibles fossiles pour le chauffage, les transports, la production d'électricité, les industries, etc. qui est responsable de l'augmentation du principal gaz à effet de serre, le CO2. Chaque année, nous émettons ainsi plus de 8 gigatonnes de carbone sous forme de CO2, soit, en moyenne, nettement plus d'une tonne par terrien !

Le graphique ci-dessous montre, à gauche, deux scénarios d'émission de CO2, l'un représente plus ou moins le "business as usual" avec une croissance mondiale des émissions de l'ordre de 3%, l'autre est un scénario "vertueux", dans lequel on suppose que les émissions seront maîtrisées dans quelques années puis commenceront à décroître.

A droite, on montre l'évolution de la concentration atmosphérique en CO2 qui en résulterait. Dans le premier cas, elle grimpe sans cesse, dans le second cas, elle plafonne vers 550 ppm.

Le CO2 dans le futur

Est-ce grave docteur ?

Quelle est la gravité de ces prévisions : 550 ppm, ou plus ?

Examinons l'évolution passée sur 400.000 ans (homo sapiens sapiens, notre espèce, est âgée d'environ 150.000 ans). Le graphique ci-dessous est le résultat de l'analyse de carottes de glace prélevées dans l'Antarctique. Ces résultats ont été largement confirmés par d'autres voies. Notons que, pour les paléoclimatologues, l'an 0, à droite du graphique, correspond par convention à l'année 1950.

On constate que la concentration en CO2 a été approximativement de 180 ppm lors des périodes glaciaires, durant lesquelles la température moyenne était de 5 °C inférieure à celle du 20ème siècle et que, pendant les périodes interglaciaires, elle a été approximativement de 280 ppm.

Or, en raison de l'utilisation massive des combustibles fossiles, cette concentration est aujourd'hui de 380 ppm et elle monte en flèche. Comme le dit un professeur de nos amis, "on est complètement sorti de l'épure".

La conclusion est imparable. La température de la Terre doit obligatoirement augmenter pour arriver à évacuer la chaleur reçue du soleil.

Le CO2 dans le passé

Comme le dit Robert Socolow, professeur d'ingéniérie à Princeton : "L'humanité est en train de mener une expérience non contrôlée à l'échelle du globe". (PLS 335, p. 76)

b. L'épuisement des combustibles fossiles

Les combustibles fossiles : charbon, pétrole et gaz naturel, se sont accumulés dans le sous-sol durant des centaines de millions d'années, en particulier durant le carbonifère (-354 à -290 millions d'années).

Il faut souligner ici une première fois la disproportion extraordinaire entre la vitesse avec laquelle ces ressources se sont accumulées dans le sous-sol et la vitesse avec laquelle l'homme les en extrait. Moins de 200 ans pour tout consommer (au rythme d'aujourd'hui) par comparaison à, disons pour être simple, 200 millions d'années, dont les 60 millions d'années du carbonifère. Soit 1.000.000 d'années pour un an ! Un million de fois plus vite ! Cela indique déjà que les quantités d'énergie que nous avons pris l'habitude d'utiliser sont tout simplement colossales !

Il n'empêche, les réserves de charbon, pétrole et gaz sont finies. Depuis les années 1970, on ne découvre plus de gisement importants de combustible. Par contre, on améliore l'efficacité des procédés d'extraction. C'est ce qui autorise les compagnies pétrolières à augmenter sans cesse le total de leurs réserves prouvées. On estime par exemple que, pour le pétrole, nous sommes pratiquement au point où la production va commencer à décroître, alors que la demande ne fait qu'augmenter.

Le graphique ci-dessous indique la quantité de pétrole (en millions de barils par jour) extraite aux Etats-Unis, dans les pays de l'OPEP (OPEC) et dans le reste du monde (dont la Russie). A gauche, ce sont les quantités effectivement extraites dans le passé. A droite, ce sont les prédictions des géologues de l'Association for the Study of Peak Oil&Gas, de moins en moins discutées dans leur principe.

Sur ce graphique on peut observer un exemple du passage par un maximum puis du déclin de la production dans une région : la production des USA, représentée en gris clair, est passée par son maximum vers 1970.

Evolution de la consommation de pétrole

Nous sommes tellement habitués aux combustibles fossiles que nous n'imaginons pas pouvoir vivre sans. Et pourtant, à l'échelle de l'Histoire, la période de consommation intensive de ces ressources se révèle tellement courte ! C'est ce qu'essaie de mettre en évidence avec humour le graphique ci-dessous.

La même évolution avec un peu plus de recul

Un grand poker menteur

Au sujet des réserves de combustibles fossiles, une question anime bien des débats : "Pour combien de temps en avons nous encore ?"

La question n'est pas de savoir si les réserves s'épuisent. Toute bouteille a un fond. Il en est de même de chaque gisement de pétrole ou de gaz et de chaque veine de charbon. La question est : quand ? dans combien de temps ?

Les évaluations de leurs réserves par les compagnies pétrolières et les états pétroliers sont tout sauf fiables. Le tableau suivant donne l'évolution de leurs réserves de pétrole, par les membres de l'OPEP, de 1980 à 1999. Les "sauts" brutaux qui y sont mis en évidence n'ont aucune origine technique, il s'agit simplement de chiffres produits par les états pour leur permettre de négocier l'augmentation de leur quota de production au sein de l'OPEP.

De même, les cours des actions des compagnies pétrolières sont dépendants de l'importance de leurs réserves. Elles sont donc tentées de les gonfler. Parfois, elles sont publiquement démasquées. En 2004, la compagnie Shell a été poursuivie aux Etats-Unis pour surestimation de ses réserves prouvées.

Le grand poker menteur des réserves de pétrole

Les "découvertes" de pétrole, gaz et charbon

La plupart des "découvertes de pétrole" sont des réestimations de la quantité de pétrole que l'on pourra extraire d'un gisement en raison de l'amélioration des techniques d'extraction. Elles permettent aux compagnies pétrolières et aux états pétroliers d'augmenter leurs réserves prouvées.

Le graphique ci-dessus rassemble les découvertes de pétrole, année après année, en utilisant la technique du "backdating". Elle consiste, pour chaque "découverte" publiée, à regarder s'il s'agit d'un nouveau gisement. Si oui, on affecte la découverte à l'année en cours. Si non, on augmente d'autant la hauteur de la barre correspondant à l'année de la découverte initiale du gisement. On distingue ainsi les vraies découvertes de nouveaux gisements des simples révisions de la partie extractible d'anciens gisements.

On insistera sur la signification du mot "découvertes" lorsqu'il s'agit en réalité de "révisions". Par exemple, on estimait pouvoir extraire 35% du contenu en pétrole d'un gisement de capacité totale de 100 millions de barils. On révise l'estimation en passant à 40%. C'est une découverte de 5 millions de barils. Cependant, la capacité du gisement n'a pas changé, elle est toujours de 100 millions de barils, une partie a déjà été extraite, une partie le sera à l'avenir et une partie ne sera jamais extraite, tout simplement parce que l'énergie utilisée pour l'extraction deviendrait supérieure à l'énergie produite.

La capacité totale d'un gisement est ce qu'on appelle les réserves ultimes. En réalité, depuis des décennies, les estimations des géologues sur la totalité des réserves ultimes n'ont pas changé significativement.

Sur le même graphique est représentée l'évolution de la consommation mondiale de pétrole. Comme on peut le constater, la consommation annuelle dépasse la découverte de nouveaux gisements depuis le milieu des années '80.

Les grandes compagnies pétrolières fournissent régulièrement des estimations sur les réserves mondiales de combustibles fossiles. D'un autre côté, l'Association for the Study of Peak Oil&Gas (ASPO), composée de géologues, d'anciens dirigeants de compagnies pétrolières et d'autres scientifiques, étudie en détail la question de l'épuisement des combustibles fossiles. Depuis peu, bien après que l'ASPO ne l'ait mis en évidence, les compagnies pétrolières ont, elles aussi, admis que l'on était en passe d'atteindre un maximum dans la production de pétrole, qui irait ensuite en diminuant jusqu'à ce que l'extraction ne soit plus possible.

En général, les considérations qui précèdent concernent plutôt le pétrole, cependant, elles sont tout à fait applicables dans leur principe au gaz naturel et au charbon.

Evaluation sommaire des réserves fossiles

Les estimations sur les réserves (pétrole, gaz et charbon), et le nombres d'années de consommation qu'elles représentent, sont âprement discutées. Malgré tout, essayons de calculer un nombre d'années global en nous basant les chiffres des réserves prouvées publiés par l'industrie (BP Statistical review of world energy 2006).

Part dans la consommation 2005 Réserves prouvées en années à la consommation 2005
Pétrole 41 % 41 ans
Gaz 27 % 65 ans
Charbon 32 % 155 ans

Faisons une hypothèse assez naturelle : si les réserves de l'un s'épuisent, on le remplacera progressivement par un autre, plus abondant, jusqu'à épuisement des trois sources. Avec cette hypothèse et le tableau ci-dessus, on arrive à une réserve globale correspondant à 84 années de la consommation actuelle.

Et si, en plus, on fait l'hypothèse conservatrice que la croissance mondiale de consommation de combustibles fossiles sera de 2 % l'an, alors la réserve globale tombe à 50 années de consommation.

La conclusion est nette, même si on révise l'une ou l'autre estimation, nous sommes tout près de la fin de l'ère des combustibles fossiles. Au moins si on considère comme proche, pour ce genre de question, notre avenir et celui de nos enfants ou petits-enfants.

Et il ne faut pas considérer cette durée comme un répit : des troubles majeurs en approvisionnement surviendront bien avant l'épuisement des combustibles fossiles. Il iront croissant dès que la demande dépassera nettement les possibilités de l'offre.

Des chiffres plus récents, ceux du "BP Statistical review of world energy 2010", montrent que la consommation croît plus vite que les réserves prouvées et que la date d'épuisement se rapproche donc encore.

Part dans la consommation 2009 Réserves prouvées en années à la consommation 2009
Pétrole 40 % 46 ans
Gaz 27 % 63 ans
Charbon 33 % 119 ans
Global 75 ans
Avec 2% de croissance 46 ans

Pour plus d'information sur le sujet des pics du pétrole et du gaz, une excellente synthèse des travaux des géologues de l'ASPO a été réalisée en 2007 par Patrick Brocorens, chercheur à l'université de Mons-Hainaut et fondateur de ASPO Belgique. Elle est publiée sous le titre "Pic du Pétrole et Pic du Gaz".

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